jeudi 24 avril 2008

Chapitre 3 - Le Paradis est Mocha

Le vol a duré dix petites minutes, pendant lesquelles j’ai pu me rappeler mes leçons de vol dispensées en Ariège, puisque j’avais le palonnier et le tableau de bord devant moi. Aussi j’ai admiré le continent s’effacer derrière nous, l’océan s’étaler en dessous, et l’île Mocha se profiler à l’horizon.



Nous avons atterris sur la petite piste de l’île, au bord de laquelle était réunie une grande partie de la population de l’île qui compte six cent habitants environ. Ils n’étaient pas venus pour nous accueillir, mais pour prendre l’avion pour Concepción qui leur permet de rejoindre le continent collectivement et de les ravitailler une fois par semaine.
Grâce au jeune couple chilien qui m’avait déjà bien aidé pour prendre l’avion, j’ai trouvé un logement et un gentil monsieur qui s’est proposé de m’y amener. Nous nous sommes donc dirigés vers le parking et je me suis retrouvée plongée quelques années en arrière, chez mon grand père, dans le Far West axonais.

La charrette nous a menés mon guide et moi, via un chemin de sable, vers le centre administratif de l’île, c'est-à-dire un groupement de maison où se trouve aussi l’église, le collège et les carabineros, du côté nord est. Je me suis installée dans la chambre d’une petite maison d’hôtes, face à la mer. Avant de manger je suis partie marcher au bord du Pacifique et découvrir le village.

Après un repas copieux servi par la maîtresse de maison, dans sa cuisine, je suis partie pour le parc national. L’île d’origine volcanique est constituée d’une plaine bonne seulement pour l’élevage et d’un cerro recouvert de forêt primitive. Je suis montée dans cette forêt magnifique jusqu’à une lagune qui manquait un peu d’eau et d’où émanaient des volutes de souffre. J’y ai quand même trempé les pieds et profité du soleil avant de continuer mon chemin vers le mirador, côté ouest. De là j’avais une vue magnifique sur le Pacifique, et l’étendue des eaux, interrompue seulement par l’île de Pâques, à 3700 kilomètres de là. J’y serais bien restée des heures tellement la beauté était prenante, éblouissante, mais je devais continuer mon chemin pour en voir plus.
La laguna Hermosa
Vues depuis le mirador

En redescendant vers l’océan j’étais seule, avec des moutons, des oies et des chevaux. Quand soudain surgit un cavalier sur la plage. Il montait sans selle, se contentant d’une peau de mouton. Comme moi il a admiré les vagues puissantes et magnifiques, les roches façonnées par les ans et les eaux, avant de repartir vers le nord pour contourner l’île.



Alors que je passais sous un rocher peuplé de mouettes, je me suis fait bombardée par celles-ci, ce qui m’a obligé à accélérer mon pas. J’ai continué de marcher sur ce chemin, absorbée par la beauté de ce paradis sauvage, sans rencontrer d’autres âmes avant de rentrer à bon port pour le dîner.

Ce dernier fut composé de locos, un coquillage dont le prix est aussi fou que son nom, cuisiné par le professeur du collège et fils de la propriétaire. Copieux et avec du caractère, les locos m’ont séduite. J’ai ensuite discuté un peu avec mes voisins, deux étudiants en biologie et vétérinaire qui venaient pour rencontrer certaines espèces animales de l’île. C’était très intéressant et j’ai beaucoup travaillé mon chilien ce soir là. Nous sommes rentrés nous coucher dans notre petite maison sous les étoiles, fatigués par nos marches et par le vent du large.


Ma petite maison dans la prairie

La vue depuis ma chambre

La cuisine


A l’origine je pensais repartir le lendemain matin, d’autant plus que je n’ai pas rencontré de possibilité de plongée sur l’île. Cependant, face à tant de beautés et à la sympathie de mes hôtes et de mes voisins, j’ai décidé de rester une journée de plus.

Le lendemain matin je n’ai pas pu faire autrement que d’aller goûter le Pacifique. Il était froid et vigoureux, mais entre quelques rochers j’ai pu me baigner, sous le regard des vaches et des mouettes. En sortant le soleil ne voulait pas se montrer pour me sécher alors je me suis réfugiée dans tous les plis de ma serviette, respirant à fond l’air marin.


L’après midi je suis partie faire le tour de l’île vers le sud, le côté le plus long. Je suis repassée par la forêt et une autre lagune, complètement à sec celle-ci. Une fois de l’autre côté de l’île je suis passée à travers les pâtures pour rejoindre le phare et atteindre son sommet en grimpant à son échelle rouillée. Des chiliens m’attendaient là haut, pour discuter un peu et admirer la vue à couper le souffle. Je suis redescendue, j’ai admiré, j’ai enlevé mes chaussures et avancé sur le sable fin caressé par des vagues rugissantes qui s’étendaient le long de plages paradisiaques.


Tout le monde ne profite pas de la même façon du Paradis et il y avait là aussi de nombreux insulaires qui récoltaient les algues sur la plage, pour les envoyer plus tard vers le Japon.


Sur une autre plage des poulpes, piégés par la marée luttaient par dizaine contre leur mort imminente et stupide. Ils sont moches et bêtes, mais de les voir lutter ainsi j’étais prise de pitié pour ces gros bouts de caoutchouc vivant ou agonisant, perdant leur souffle et leur encre sur la plage, dans les dernières vagues de la marée, avant que les mouches ne viennent s’en repaître.

Le retour à la maison fut très long et heureusement, un des seuls véhicules à moteur de l’île m’a prise en stop pour les derniers kilomètres avant que la nuit ne tombe. Au dîner c’était fête, pour cause d’anniversaire de celui que je crois être le père du professeur. Gâteaux apéritifs et soda au goût de médicaments furent au menu. On a beaucoup discuté, beaucoup rit, comme en famille. C’était bien, j’étais bien, je ne voulais pas partir.

Pourtant il fallait bien continuer et j’ai fait mon paquetage le lendemain, j’ai pris des photos chez les carabineros qui m’y avait invité puis, le cheval indisposé mais vaillant tout de même, nous a mené à l’aérodrome et nous nous sommes envolés, mes voisins pour retourner à leurs études, moi pour rejoindre les Andes.

J’ai passé deux jours inoubliables sur cette île magnifique. Un petit paradis de 14 km de long et 6 km de large, près des côtes et déjà dans l’immensité pacifique, puissante, enivrante, grandiose, impressionnante. Les gens y sont accueillants, généreux de cœur et bavards, à l’image de leur petit bout de terre, leur monde à eux, loin de tout, proche du cœur.

2 commentaires:

Hélène a dit…

Hey, j'avoue que j'ai beaucoup de retard dans la lecture du blog, mais je vais le faire!! C'est superbe où t'étais ça donne envie, j'espère que je vais trouver des petites îles croates ds le même style (plus ou moins... l'océan en moins déjà)!! C'est beeaaaauuu

Solène a dit…

Je lis tes commentaires à l'envers, merci pour tous.